Une autre empreinte : interview de Sandrine Elberg
Notre série d’interviews des trois lauréats du prix photo Une autre empreinte se poursuit : après Julien Coquentin, nous vous proposons aujourd’hui d’en apprendre plus sur Sandrine Elberg, qui répond à son tour à nos questions. Rendez-vous dans quelques jours pour retrouver l’interview de Xavier Dumoulin, le troisième lauréat du prix !
L’exposition des trois photographes sélectionnés par le jury de la deuxième édition du prix photo Dahinden – Une autre empreinte approche : elle aura lieu du 8 septembre au 30 octobre, à l’Académie du Climat de Photoclimat.
Sandrine Elberg est très inspirée par l’espace, le cosmos et les paysages lunaires. Elle a déjà remporté de nombreux prix et ses œuvres ont fait l’objet de plusieurs ouvrages.
Comment vous présenteriez-vous ?
Je suis photographe auteure.
Après des études en cinéma audiovisuel et en arts plastiques, ma formation fut renforcée par cinq ans d’études à l’Ecole Nationale Supérieure des Beaux-arts de Paris dont je suis sortie diplômée d’un DNSAP en 2003. Dès 2004, je fus lauréate de la résidence d’artiste AFAA/Paris/Moscou soutenue par la Ville de Paris et la Maison de la photographie de Moscou dirigée par Olga Svilblova pour le projet Devenir Russe. L’année suivante je fus invitée par Dominique Abensour à participer à l’exposition Bon voyage et deviens la plus jeune artiste exposée au centre d’art contemporain Le Quartier.
En 2010 lors de l’année culturelle France-Russie, je présente à nouveau ce corpus photographique à l’occasion de nombreux événements dont la 8e Moscow Photobiennale au musée d’Art Moderne.
J’ai participé à plus d’une centaine d’expositions et d’évènements liés à la photographie au sein de prestigieuses institutions :
Noir et blanc une esthétique de la photographie collection BNF au Grand Palais, OSMOSCOSMOS au Centre de la photographie à Genève, Cosmic au Tri Postal à Lille, Cosmos, silence on tourne ! au LAAC à Dunkerque. Sur une invitation du premier festival Paris Expérience Photo soutenu par la RATP, mes tirages grands formats ont recouvert les murs des stations du métro parisien.
Je suis également lauréate et finaliste de plusieurs Prix photographiques et résidences d’artistes de grande renommée : Villa Kujoyama/Institut Français au Japon, Prix Photographie et Sciences soutenu par la résidence 1+2/CNRS, Talents contemporains Fondation François Schneider, Prix HSBC, Fondation Les Treilles, Prix Scam Roger Pic, Prix Arte actions culturelles et Prix Réponses Photo au festival Les Boutographies, Prix Canon, Prix Fnac et Nikon.
In fine, j’attache une importance particulière aux éditions qui complètent mes expositions. Après le succès de mon premier livre autoédité Cosmic, ma deuxième monographie M.O.O.N est distinguée par Best Photography Book Award à Photo Espana, par le Jury du Prix Nadar, puis Lucie Photobook Prize à New-York et enfin le Prix HIP.
En 2020, mon dernier livre JÖKULL, la mémoire des glaciers est présenté pour la première fois au Fotobok Festival Oslo en Norvège.
Depuis 2015, mon travail se concentre sur la thématique de l’astronomie et des sciences.
Quelles sont vos principales sources d’inspiration artistique ?
Dans mon approche photographique, je m’intéresse en premier lieu à la matérialité de la photographie et de son support. J’utilise aussi bien le papier photographique argentique que des plaques d’aluminium pour accueillir le geste photographique. Il en va de même concernant le processus de création qui mêle et juxtapose également les outils et les expérimentations argentiques et numériques.
Influencée par l’histoire de l’art des années vingt, j’expérimente la consistance même de ce médium, en déclinant ses possibilités techniques et esthétiques.
J’aime créer des images entre rêve et réalité, entre science et utopie, entre photographie et gravure.
La thématique développée depuis sept années met en exergue un univers esthétique lié au cosmos que viennent ponctuer des paysages et territoires inconnus. Je révèle des photographies qui n’existent pas encore, inspirées par mes voyages et par les découvertes scientifiques et environnementales.
Pourquoi avoir choisi cette série en particulier lorsque vous avez candidaté au prix ?
Les glaciers concentrent pas loin de 70% de l’eau douce sous forme solide de notre planète ainsi ils sont d’une importance capitale pour le maintien de la vie sur terre.
JÖKULL, la mémoire des glaciers est un travail au long court que j’ai finalisé en janvier 2020 grâce à une résidence d’artiste après cinq voyages en hiver arctique depuis 2015. Celui-ci mets en exergue la fragilité des glaciers d’Islande dû au réchauffement climatique.
Ce corpus est né du premier constat funeste d’un glacier officiellement déclassé en 2014.
Le 18 août 2019 en Islande, une plaque commémorative A letter to the future a été inaugurée en l’honneur d’Okjökull, premier glacier disparu sur l’ile subarctique.
Ce travail est un hommage au sublime, aux glaciers d’Islande avec leurs failles, cicatrices, tourbillons, moulins et crevasses. Les différentes vues des glaciers sont érigées sous les ciels étoilés et la lune de l’ile pour une invitation à la contemplation et la rêverie. Ce travail contribue ainsi de manière poétique à la mémoire des glaciers et à leurs préservations.
J’ai un véritable attrait pour les territoires en nature hostile comme les îles volcaniques, les glaciers voir les grottes de calcaire. Cela nourrie mon imaginaire et cela permet d’offrir au regardeur des panoramas magiques et insoupçonnés.
Pouvez-vous nous parler des procédés photographiques utilisés pour cette série de photos ?
De manière concise, dans mon approche photographique sur le plan formel, je m’intéresse au processus de création qui mêle et juxtapose différents outils et expérimentations argentiques et numériques. Ma pratique artistique propose une vision décloisonnée et hybride de la photographie.
D’une certaine façon, les images ainsi obtenues pour certaines font l’objet de quelques manipulations et expérimentations (photogramme et chimigramme) pas loin de la veine des surréalistes que j’affectionne beaucoup. Cette évocation des univers surréalistes est accentuée par la versatilité des techniques que j’emploie, à travers le principe de solarisation ou en intervenant sur les négatifs de façon chimique par exemple mais aussi par découpage et juxtaposition.
Certaines images peuvent être simplement numérisées pour pouvoir être imprimées sur des supports peu conventionnels ou agrandies par exemple.
Je n’ai pas de protocoles précis à dévoiler, tout est question d’inspiration et de cohérence.
Enfin, l’une des caractéristiques de mon travail photographique est l’usage presque qu’exclusif du noir et blanc. Le noir est l’absence de couleurs et de lumière que l’on imagine facilement pour caractériser les nuits étoilées par exemple. C’est bien sûr un choix esthétique réfléchi qui permet de lier toutes mes séries photographiques sans chronologie.
Si le clair-obscur et le noir et blanc agissent sans doute comme révélateur technique, chimique et esthétique dans mon travail ; c’est encore mon rapport aux sciences et à la notion de voyage qui caractérise le mieux ma démarche artistique.
L’exposition de vos œuvres et de celles des deux autres lauréats du prix photo Dahinden – Une autre empreinte à l’Académie du Climat à Photoclimat aura lieu du 8 septembre au 30 octobre. Avez-vous d’autres projets ou expos à venir ?
Oui effectivement, voici les expositions et projet à venir :
Exposition personnelle :
Du 30 septembre prochain au 2 janvier 2023 : Cité de l’espace – Résidence 1+2, Toulouse
Du 1er au 31 octobre : Nuit blanche 2022, Rêves cosmiques avec le soutien de l’Institut Français, Shoheido, Kyoto, Japan
Du 1er au 11 décembre 2022 : Solo show, avec le soutien de l’Institut Français, RedBrick warehouse, Yokohama, Japan
Exposition collective :
Jusqu’au 2 octobre : Fotofestival Lenzburg Re:sources 2.0 JÖKULL, Lenzburg, Switzerland
Du 8 novembre au 23 décembre 2022 : Les Photaumnales CØSMØGRAPHIE, curatrice Emmanuelle Halkin, Espace Matisse, Creil
Je prépare également un nouveau projet issu de ma résidence de trois mois au printemps dernier à la Villa Kujoyama à Kyoto soutenu par l’Institut français. Ce corpus photographique donnera lieu également à une monographie en 2023.
Pour en savoir plus sur Sandrine Elberg, rendez-vous sur son site web.
Vous pouvez voter pour votre lauréat favori via ce formulaire afin de lui permettre de remporter une exposition de ses œuvres lors de la 25ème édition de Paris Photo, du 10 au 13 novembre prochains.