Une autre empreinte : interviews de Xavier Dumoulin
Une autre empreinte – prix photo Dahinden 2022 : Xavier Dumoulin remporte le prix du public
Xavier Dumoulin fait partie des 3 lauréats de la deuxième édition d’Une autre empreinte – prix photo Dahinden, aux côtés de Sandrine Elberg et de Julien Coquentin. Suite à un appel au vote, sa série « Incandescences » est celle qui a remporté la majorité de vos suffrages : Xavier devient donc le grand gagnant de cette édition 2022 !
Suite aux résultats du vote, nous avons posé quelques questions à Xavier Dumoulin :
Félicitations Xavier, vous avez remporté l’adhésion du public qui vous a désigné comme le grand gagnant de l’édition 2022 d’Une autre empreinte – prix photo Dahinden, avec votre série « Incandescences ». Vos œuvres seront exposées du 10 au 13 novembre à Paris Photo. Quel est votre sentiment suite à cette annonce ?
Je suis très ému par cette annonce. Etre choisie par le public est la plus belle des récompenses pour cette série qui a été faite pour lui ! J’ai toujours souhaité que ces photos soient le plus visibles possible, sortent des salles d’arts, soient utilisées, illustrent, participent au changement politique et à la prise de conscience de l’urgence écologique. Je pense que l’immédiateté visuelle du symbole qu’elles évoquent peut parler au plus grand nombre et je suis ravi de ce coup de projecteur sur le fruit de mon engagement. C’est allé très vite et très fort. Ce concours remporté avec Julien et Sandrine, l’exposition à l’Académie du Climat et un mois après un solo show pendant Paris Photo. J’arrive sur une autre planète après avoir été jeté par surprise dans une fusée appelée Dahinden ! Un rêve qui se réalise, la reconnaissance de mon travail, la fierté d’exposer parmi tous ces montres sacrés de la photographie… Les sentiments sont nombreux et parfois contradictoires mais cette exposition semble bien être réelle et j’ai l’intention d’en savourer chaque instant !
La série « Incandescences » semble particulièrement pertinente face à l’actualité de ces derniers mois. Quand l’avez-vous réalisée ? Quel était votre état d’esprit au moment des prises de vue ?
C’est une série que j’ai commencé il y a une dizaine d’année. Les problématiques environnementales n’occupaient pas encore le devant de la scène mais les signes de l’urgence étaient bien présents depuis déjà longtemps. En tant qu’accompagnateur en montagne, je les voyais au quotidien, que ce soit dans les Pyrénées ou au Cap Vert : le manque d’eau, la désertification, la fonte des glaciers qui faisaient écho à notre système du tout argent. Une opposition et un lien de cause à effet qui n’est pas supportable quand on en prend pleinement conscience. Alors à défaut de faire la révolution, j’avais besoin de l’exprimer au travers de cette série. L’humanité en est là aujourd’hui grâce et à cause du feu qui maintenant nous étouffe et nous consume. C’est vrai qu’en dix ans, l’incandescence symbolique de la dichotomie entre l’Homme et la nature est devenue incendie et méga feux bien réels ! La photo de la dune du Pilat est troublante en ce sens…
Pouvez-vous nous parler de vos autres expositions qui ont lieu actuellement ?
J’expose en ce moment ma dernière série « Tropique des Pyrénées » au Bel Ordinaire qui est la salle d’art contemporain de l’agglomération de Pau et à l’extérieur, dans la ville, pour le festival des transitions. Une double exposition avec des photos différentes pour tous les publics, amateurs d’art et simple passants.
Suite d’ « Incandescences » et de « Limites », « Tropique des Pyrénées » traite des causes et des conséquence du réchauffement climatique dans un même travail. J’ai voulu faire passer la ville de Pau pour une ville tropicale américaine. Un décor hollywoodien nocturne que nous ne pouvons plus nous permettre avec ses lumières, ses publicités, ses champs de béton… Les causes éclairent ici les conséquences. La végétation tropicale occupe le paysage, la Floride vient s’inviter au pied des Pyrénées. J’invite le spectateur à devenir acteur, à Voir pour prendre conscience pleinement du monde dans lequel on vit, à quel point il est en mutation. Voir d’autres scènes que j’aurais pu photographier, changer de point de vue et devenir sensible à cette multiplicité d’indices. Voir enfin au-delà des apparences pour comprendre les implications sur nos vies et celles de nos enfants.
Une autre empreinte : interview de Xavier Dumoulin
Pour conclure notre série d’interviews des trois lauréats du prix photo Une autre empreinte 2022, nous retrouvons aujourd’hui Xavier Dumoulin. Tout comme Julien Coquentin et Sandrine Elberg avant lui, il répond à nos question, et présente sa série et son approche de la photographie.
L’exposition des trois photographes sélectionnés par le jury de la deuxième édition du prix photo Dahinden – Une autre empreinte approche : elle aura lieu du 8 septembre au 30 octobre, à l’Académie du Climat de Photoclimat.
Photographe d’architecture, Xavier Dumoulin réalise également des reportages ainsi que des photos et vidéos par drone. Il aborde ici les thèmes de la pollution lumineuse et du réchauffement climatique.
Comment vous présenteriez-vous ?
Comme un passionné de montagne et de nature qui tente de voler des moments d’éternité glanés là où l’Homme ne peux pas s’attarder, un chercheur de sens qui questionne sans cesse son environnement en quête d’indices sur ce qui est essentiel. Un photographe enfin pour exprimer ces ressentis, pour matérialiser ces abstractions et tenter de faire des images suffisamment significatives pour aider à une prise de conscience de l’absurdité des priorités de notre civilisation.
Quelles sont vos principales sources d’inspirations artistiques ?
Artistique signifie pour moi avoir du sens et mettre en œuvre les moyens pour que le message délivré soit le plus juste possible.
Naturellement, je vais aller vers des images épurées, assez minimalistes pour ne pas altérer le message. Ce mouvement dans l’art asiatique me plaît beaucoup et notamment l’idée du trait essentiel qui exprimera le plus simplement possible le sujet, le mouvement et le sens comme les paysages de Satsuki Shibuya.
J’aime beaucoup aussi sortir du réel pour traiter un sujet, m’adresser à la partie onirique et poétique de chacun, placer le spectateur face à une histoire qu’il va continuer pour ainsi s’approprier le sens des photos.
Esthétiquement, j’ai été marqué par Edward Hopper, les ambiances de ses tableaux et sa maîtrise de la lumière.
Pourquoi avoir choisi cette série en particulier lorsque vous avez candidaté au prix ?
Cela fait plus de dix ans que je traite la place de l’Homme dans son environnement, révélatrice de sa place dans la société. D’autres séries auraient pu prendre leur place dans ce concours. Incandescences s’est imposée pour son immédiateté visuelle et son sens qui va à l’essentiel. Là ou s’installe l’Homme, le feu consume tout ! Je pense que cette série peut s’adresser à tous les publics et dépasser l’artistique pour devenir pédagogique. Servir de support pour la pollution lumineuse, la consommation d’énergie, les incendies et plus largement l’avidité humaine et sa propension à tout coloniser et à tout détruire.
Pouvez-vous nous parler des procédés photographiques utilisés pour cette série de photos ?
Beaucoup de contraintes pour cette série ! L’idée était de photographier des villages isolés en plongée dans une nature visible en pleine nuit. Il fallait donc être au bon endroit avec la pleine lune par ciel dégagé. Beaucoup de recherches sur Google Earth on été nécessaires afin d’estimer les possibilités de points de vue pour gagner ensuite en efficacité sur le terrain une fois la fenêtre météo et astrale propice. Je faisais ensuite le tour des villages à pied pour trouver le bon cadrage. La photo finale se fait sur pied avec mon objectif fétiche de 24mm à décentrement. C’est du one shot ! Pas de montage HDR ou autres compilations d’images. La surexposition nécessaire pour obtenir l’aspect enflammé me permettait d’aller chercher des informations dans le paysage.
Avez-vous d’autres projets ou expos à venir ?
Je viens de terminer ma dernière série « Tropique des Pyrénées ». Projet porté par le collectif de photographes « A Propos », soutenu par la région Nouvelle Aquitaine et qui a regroupé les acteurs locaux de l’art et de l’écologie. Ce double aspect est très important pour moi ainsi que la photo s’adressant à tous les publics. Après avoir traité les causes puis les conséquences du réchauffement climatique, j’ai voulu traiter les deux dans une même série. Ainsi, sur une unité de lieu restreinte à l’agglomération de Pau, j’ai photographié des paysages de nuit qui pourraient faire penser à une ville tropicale américaine.
Il y aura une double exposition simultanée en octobre à Pau. 15 photos grand format seront exposées dans la ville en extérieur et d’autres images dans une salle d’art contemporain : Le bel Ordinaire où aura lieu le vernissage le 19 octobre.
Pour en savoir plus sur Xavier Dumoulin, rendez-vous sur le site web de ce photographe.
Vous pouvez voter pour votre lauréat favori via ce formulaire afin de lui permettre de remporter une exposition de ses œuvres lors de la 25ème édition de Paris Photo, du 10 au 13 novembre prochains.